MPF Aveyron.
Sortie du dimanche 12 avril 2015.
Le Village abandonné de Roucairols (Villefranche-de-Panat). Opération de débroussaillage.
Photographies : Sylvie Langevin, Jean-Pierre Henri Azéma.
Texte : Jean-Pierre Henri Azéma.
Le cadre géographique et paysager.
Par ce dimanche ensoleillé une vingtaine de personnes se sont retrouvées sur les bords du Tarn, au village du Truel, dont le nom occitan signifie « pressoir », ce rappelle l’importance passée de la vigne dans la vie locale. Monsieur Joël Saint, dont les parents vécurent à Roucairols, nous accueillit et nous présenta le cadre géographique et historique. Le nom du lieu signifie « lieu rocheux » en langue d’oc. Le village de Roucairols, établi sur un adret, bien que proche du Tarn se trouve à l’extrémité sud d’une bande relevant de la commune de Villefranche-de-Panat. Cette vallée escarpée est le royaume des terrasses retenues par des murs en pierre sèche. Les paysans vivaient de la production maraîchère, sur les terres alluviales bordant le Tarn, tandis que la vigne était cultivée sur les terrasses. Sur ce versant aride on trouve exceptionnellement une végétation partiellement méditerranéenne avec des chênes verts et autrefois des amandiers. La culture des céréales n’était possible que sur le plateau du Ségala, dans la partie haute et septentrionale de la commune. Pour vivre au quotidien, il fallait donc échanger entre ces deux terroirs complémentaires. Le moulin à grain de Roucairols, bien que sis sur la rive gauche du Tarn, commune de Broquiès desservait le hameau par l’intermédiaire d’un gué et d’un bac. Les dernières familles ont quitté les lieux vers 1950-1955, après la construction du barrage de la Jourdanie (1938), qui noya les terrains maraîchers. La crise du phylloxéra de la fin du XIXe siècle avait déjà durement touché l’économie locale. Depuis plus de 60 ans la végétation ligneuse à envahi tout l’espace.
Le village et son bâti.
Roucairols est formé d’un ensemble de bâtiments égrenés le long d’un chemin escarpé. Ici le matériau de construction est la pierre de schiste, qui affleure partout. Les maisons, à demi enterrées, sont construites à l’emplacement de carrières. La majorité des ouvertures, portes et fenêtres sont supportées par des cadres en bois de châtaignier. Les pierres de taille sont très rares et l’on trouve parfois des encadrements portes ou de fenêtres ou des bouches de fours à pain en grès. Cette roche provient de l’autre rive du Tarn, là où commence le Rougier de Saint-Affrique-Camarès. Le schiste et parfois des blocs de quartz sont les matériaux de construction des murs. Pour le couvrement des toitures à faible pente, voisine de 30 %, on ne trouve que le schiste en dalles. De fait après l’abandon du village, faute d’entretien, les toitures sont tombées emportant tout sur leur passage.
Chaque famille avait son four à pain. L’alimentation en eau se faisait par citernes établies sous les maisons. Le transport ne pouvait se faire qu’à dos de mulet. La famille Saint possédait une maison avec un four à pain et un petit bâtiment qui servait d’écurie (rez-de-chaussée) de fenil (étage) proche d’un autre four à pain et d’une bergerie partiellement adossés à la montagne.
En ce qui concerne la technique de construction des murs en pierre de schiste, les spécialistes Eric Gross et Didier Combret ont livré quelques détails techniques. La pierre de schistes ne pouvant se tailler doit être prise en l’état. Ses bords sont souvent biaisés. De fait pour maintenir l’aplomb d’un mur est-il obligatoire de mettre en place la pierre avec l’angle aigu sur le haut. Cela forme ainsi une succession de redents. Jusqu’à un passé récent, le hameau était accessible au moyen de 4 X 4, et de nombreux dépeceurs sont venus piller les maisons emportant pierres de tailles, pour le peu qu’on y trouve et des pierres de toitures. L’accès est rendu impossible aujourd‘hui. Les murs de soutènement sont localement démolis.
Du débroussaillage à la gastronomie.
La vingtaine de bénévoles de MPF Aveyron, armées de sécateurs, poudets, haches, faucilles, scies, ont pris d’assaut le corset végétal qui cernait une partie du hameau, autour des maisons de la famille de Joël. En deux heures, les chemins ont été dégagés autour des bâtiments, et le bâti devint plus lisible et compréhensible. Les façades prenaient une nouvelle lumière. Après ces efforts et ce travail d’équipe, tous partagèrent le repas de midi. En cette terre autrefois viticole, nous avons fait un long voyage gastronomique. Nous avons partagé des vins de Marcillac (cuvée spéciale), du Languedoc, des Côtes de Gascogne et même de Bordeaux. Joël Saint, offrit aux défricheurs des rissoles aux pruneaux, faites maison.
L’après-midi fut consacrée à une longue promenade sportive sur les sentiers perdus qui reliaient Roucairols à Villefranche-de-Panat et au village d’Arnac. Bien que le chemin soit municipal, les arbres et arbustes l’ont envahi et il a fallu faire beaucoup de gymnastique et de contorsions pour circuler entre les pierres et passer sous les troncs d’arbres. Nous avons découvert le château néo-moyenâgeux au Mas de Sarret, puis le hameau des Rives-hautes et retrouvé nos voitures au bord du Tarn. La journée s’est clôturée au Mas de Vayssette, chez Jean-Eudes de Crisenoy, avec partage du verre de l’amitié autour de morceaux de fouace et de boissons forts appréciées.